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2009
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Jean-Marc Huygen aborde ici le thème du réemploi des matériaux de construction notamment par l'utilisation de matériaux recyclables tels que la terre crue. Cette vidéo a été réalisée à l'occasion du cycle de formation Ekopolis "Concevoir et construire durable, du territoire au bâtiment" le 4 décembre 2009. La thématique de cette journée était "MATERIAU : comment mettre en oeuvre le réemploi et la réutilisation".
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Réalisation : Julien Ravoux
Résumé de l'intervention
Pour donner forme à des matériaux, des objets ou des bâtiments, on assemble de la matière en consommant irréversiblement de l’énergie. Lorsque ces objets deviennent obsolètes, sans usage, on ne peut plus simplement les laisser de côté au profit de nouveaux objets, les démolir et les mettre en décharge : matière et énergie ne sont pas inépuisables, décharges et pollutions ne peuvent s’étendre à l’infini. Au-delà de la simple réutilisation des objets obsolètes (prolongation d’usage), mais avant leur recyclage (récupération de leur matière par une nouvelle dépense d’énergie), il est plus avantageux d’envisager leur réemploi (réutilisation maximale des formes, pour une autre utilisation). Le réemploi est la réappropriation des matières et formes existantes pour de nouveaux usages : d’une part, c’est une économie de matière, d’énergie et de pollutions ; d’autre part, ces objets obsolètes sont porteurs de mémoire de leurs anciens usages, qui constitue peu ou prou un héritage patrimonial, une relation entre les générations. Cette philosophie du respect de l’existant sans condescendance ni conservatisme commence dès la première utilisation de la matière et se prolonge dans la manière de consommer et d’être avec les autres : un objet est là et dans son être, comment le garder au maximum tel qu’il est pour répondre à mon besoin d’usage ? Je récolte un bloc de pierre dans un champ et le taille le moins possible ; je récupère une vieille chaise pour en faire la structure d’un meuble ; j’utilise d’abord l’eau de pluie ; j’établis mon logement dans une ancienne usine ; je vis avec toi…
L’architecte conventionnel pense un projet ex nihilo, en intégrant, dans le meilleur des cas, le bâti voisin existant, la course du soleil et le programme ; puis il fait appel à un catalogue de matériaux produits à la demande et disponibles en quantité illimitée. C’est ce catalogue qu’il faut remettre en question dans la logique du réemploi : les matériaux sont là, en quantité limitée, et ils occasionnent – ou permettent – le projet. Dans l’architecture du réemploi, la phase de conception est partiellement modifiée :
- Le temps devient un réel composant du projet. Non seulement en ce qui concerne la durée de l’objet fabriqué, avec la participation du futur usager et la flexibilité d’usage. Mais aussi dans la fabrication : glanage d’objets et inventaire préalable de ce qui est disponible ; expérimentation, accomodage et raccommodage ; assemblage technique et esthétique et prévision d’un futur désassemblage (réversibilité).
- Plus que jamais, il s’agit de raisonner et de réactiver la multifonction chère au Mouvement moderne : la matière grise est la moins coûteuse. Non seulement en ce qui concerne la réponse, habituelle, aux attentes d’espace et de fonction. Mais aussi, dans une logique de restriction, pour faire le meilleur usage de ce qui est disponible et le plus bel effet à partir de matériaux disparates et imposés.
- Le travail trandisciplinaire permet de croiser savoirs et savoir-faire. L’architecte doit travailler, en amont, avec l’ingénieur, le créateur textile, l’artiste, le sociologue, le botaniste… Ensemble, ils peuvent élaborer des dispositifs complexes.
Biographie et bibliographie de Jean-Marc Huygen
Jean-Marc Huygen est ingénieur civil architecte, diplômé de l’Université de Liège. Il a réalisé en Belgique des maisons, réhabilitations, musées,
scénographies d’expositions. Il enseigne l’architecture depuis 1988 à l’université de Liège, puis à l’École nationale supérieure d’architecture de
Grenoble puis de Marseille (depuis 2009) : projet, construction, espace public, soutenabilité. Jean-Marc Huygen travaille également à la recherche : modes de relation entre bâtiments, entre matériaux, entre usage et consommation ; labyrinthe, textile, réemploi, compacité. Il est auteur de La poubelle et l’architecte – Vers le réemploi des matériaux, Actes Sud, 2008 et exerce en tant que conseiller sur les matériaux de réemploi à la friche Belle de Mai à Marseille.
Bibliographie complémentaire
Rapport Brundtland. Commission mondiale sur l’environnement et le développement, 1987, dans l’édition française Notre avenir à tous, Éditions du Fleuve, Montréal, 1988.
Colins George R. Les bâtisseurs du rêve, Éditions du Chêne, Paris, 1980.
Alberto Magnaghi. Le projet local, Mardaga, coll. Architecture + Recherches n° 44, Sprimont, 2003 (Turin, 2000).
Giovanna Borasi et Mirko Zardini (dir .). Désolé plus d’essence – L’innovation architecturale en réponse à la crise pétrolière de 1973, Centre canadien d’architecture et Corraini, 2007.
Culot Maurice et Pirlot Anne-Marie (dir.). Architectures autrement - Habiter le monde, AAM, Bruxelles, 2006.
Dagognet François. Des détritus, des déchets, de l’abject – Une philosophie écologique, Les Empêcheurs de penser en rond, Paris, 1997.
Manzini Ezio. Artefacts - Vers une nouvelle écologie de l’environnement artificiel, Éditions du Centre Georges-Pompidou, coll. Les
essais, 1991.
Oppenheimer Dean Andrea. Rural Studio – Samuel Mockbee and an Architecture of Decency, Princeton Architectural Press, New York, 2002.
Oppenheimer Dean Andrea. Proceed and Be Bold – Rural Studio After Samuel Mockbee, Princeton Architectural Press, New York, 2005.
Pawley Martin. Building for tomorrow – Putting Waste to Work, Sierra Club Books, San Francisco, 1982.
Riout Denys. Le jardin des merveilles de Bodan Litnianski, Vivement dimanche, Amiens, 2004.
Serres Michel. Le Mal propre – Polluer pour s’approprier ?, Le Pommier, coll. Manifestes, Paris, 2008.
Lombardi Sarah et Rousseau Valérie (dir.). Richard Greaves, anarchitecte/anarchitect, 5 Continents Éditions, Milan, et Société des Arts Indisciplinés, Montréal, 2005. Catalogue d’exposition.